Giuseppe Penone

Giuseppe Penone est un artiste contemporain Italien appartenant au courant de l’arte povera et proche du land art. Il est une figure importante de la scène artistique internationale et est associé au mouvement de l’Arte Povera fondé par la critique d’art Germano Celant à la fin des années 1960. Ce mouvement artistique cherche avant tout à prôner le retour à l’essentiel de l’art, en engageant notamment une réflexion sur la relation entre nature et culture. Aujourd’hui il vit et travaille à Turin, mais est également enseignant à l’École nationale supérieure des Beaux-arts, à Paris.

Giuseppe Penone s’intéresse à la relation qu’a l’Homme avec son environnement et la nature. Cela se traduit par des sculptures et des oeuvres qui revêtent des formes organiques et naturelles. Il utilise alors dans ses réalisations des éléments de la nature qu’il connaît parfaitement bien (le bois, la terre, …), car étant fils et petit-fils d’agriculteur, il a effectivement toujours été en contact direct avec l’environnement; le rythme des saisons, le travail dans les champs, les formes et les couleurs des récoltes ont fortement influencé sa sensibilité envers la nature. Pour lui, son art a un lien directe avec celle-ci.

« Créer une sculpture, c’est un geste végétal ».

Giuseppe Penone

Selon lui, la tranquillité de la campagne est très importante, c’est ainsi qu’il profite pleinement de son domaine en Italie, loin de l’agitation de la ville. Il travaille donc les matériaux naturels et place l’arbre au centre de ses projets artistiques. À tout juste vingt et un ans en 1968, il réalise ses premières œuvres dans une société qui voit naître de grands changements et abordera par la suite, de différentes manières, la relation du corps dans ses propres sculptures; l’implication de son propre corps sera fondamentale dans ses œuvres.
Convaincu que le paysage est chargé de signes inscrits dans la mémoire des matières végétales, organiques et minérales, il tend dans ses réalisations à révéler la présence humaine et à rappeler à l’intérieur de ses sculptures, la virginité et la pureté de la nature. L’empreinte sera donc le moyen le plus important pour lui de relever se lien étroit entre corps et nature.

« L’empreinte, c’est une chose que tout le monde dépose autour de soi, et que l’on passe une partie de sa vie à tenter d’effacer. C’est une image animale, une image de la matière, mais c’est aussi une image complètement culturelle. ».

Giuseppe Penone

La relation entre le corps de Penone et son oeuvre

Ainsi l’artiste met en évidence, dans les espaces vierges, des signes profonds de la présence humaine voir du destin de l’homme. Il aborde de différentes manières la relation du corps à l’œuvre. Parmi les conceptions qui répondent à cette idée, on peut noter en 1968 un moulage qu’il réalise en bronze, à partir de sa propre main. Une copie d’une partie de son propre corps sera donc immortalisée et évoluera avec l’arbre (vu que celui-ci ne cessera de grandir), car avec le temps, il pourra par exemple recouvrir en partie le moulage. Il s’intéresse ainsi à la feuille et à l’écorce de l’arbre, à la couleur de l’oxydation naturelle, à l’érosion des éléments et au temps qui enregistre les transformations des choses.

En 1970, il commence une série d’œuvres impliquant le lien entre la peau et l’empreinte.
Les œuvres de Giuseppe Penone se situent entre peinture et sculpture, faisant à la fois appel à la vue et au toucher. Conjuguant ces deux sens il crée une nouvelle dimension sensorielle dans laquelle évoluent ses oeuvres.

Parmi ces œuvres, il est à noter la sculpture; Souffle de feuilles, qu’il réalisa en 1976.
Souffle de feuilles, 1976

Grâce au négatif, il laisse l’empreinte de tout son corps dans un amas de feuilles, dans lequel du bronze y sera coulé, pour ainsi fossiliser et immortaliser ce geste. La relation du corps à l’œuvre n’a ici rien à voir avec le Body art par exemple, où l’artiste met en scène son propre corps à l’occasion de performances. Penone inscrit son corps dans la nature pour en révéler les processus invisibles, en exalter le cycle naturel, dans une trame subtile d’affinités sensibles avec la nature humaine elle-même. L’analogie entre monde animal et végétal est un des moteurs de son art.

L’artiste au travers de ses œuvres et grâce au procédé de l’empreinte, invite le spectateur à une immersion tactile dans le lieu. Ainsi, le créateur passe de la sculpture à des œuvres impliquant le dessin, des œuvres bidimensionnelles mais qui, se développant dans l’espace, permettent une autre approche. Encore une fois, à travers la copie, l’acte de retracer fidèlement par le dessin la trame agrandie de sa paupière, il nous présente une image on ne peut plus proche du corps humain. Pourtant, celle-ci n’est pas sans évoquer les ramifications qui la constituent : celles du monde végétal.

Giuseppe Penone, de même que RichardLong, WalterdeMaria, RobertSmithson, et DenisOppenheim se mesurent à l’expression de la puissance terrestre, évaluant leurs sculptures à la force des fleuves et des neiges ou même à la croissance des arbres.

« L’arbre est une matière fluide, qui peut être modelée. Le vecteur principal est le temps: l’homme a une temporalité différente de celle d’un arbre; en principe, si on empoignait un arbre et qu’on avait la constance de ne pas bouger durant des années, la pression continue exercée par la main modifierait l’arbre ».

Giuseppe Penone en 2004


Le choix de l’arbre, comme support essentiel de la création, est lié chez l’artiste à sa capacité à se transformer, à passer d’une forme à une autre et à se prêter aux métamorphoses les plus étranges. Si sa démarche peut parfois sembler fondamentalement contemporaine, l’oeuvre de Penone renvoie parfois à des notions parfois archaïques ou romantiques où la nature s’anime, dans la poésie inquiétante des métamorphoses. Répondant à cela, on peut rappeler une de ses œuvres réalisée en 1986, Sentier de charme.

Sentier de charme, 1986

Avec cette oeuvre in situ (oeuvre réalisée en fonction du lieu qui l’accueille), l’artiste italien implante une silhouette de femme, qui se marie parfaitement avec l’arbre qui l’accompagne. La dimension très poétique qui s’en dégage rejoint également une des idées qu’affectionne le plus Penone; celle de l’évolution aléatoire de l’oeuvre, étant donné que la silhouette en bronze est figée dans le temps alors que l’arbre ne l’est pas.

En copiant le nature, Penone cherche à réaliser des œuvres pérennes et met également l’accent autant sur le processus de création que sur l’œuvre.

Revisiter le processus créateur lui même

Sensible à l’état transitoire des choses, l’œuvre de l’auteur ne manque pas de s’intéresser au processus créateur lui-même. Pour Giuseppe Penone, l’artiste est celui qui se mesure à l’impossible, insuffle la forme et fait naître, par les béances de celle-ci, l’activité imaginaire qui complète ce que l’œuvre suggère. Mais être artiste c’est autant donner forme qu’intégrer les vides, les renversements de la forme, laisser pleinement à l’œuvre le statut d’œuvre ouverte.


Le mouvement, qui est au coeur de la sculpture de l’artiste, se retrouve dans cette volonté de ne pas arrêter les formes, de les garder au plus près de leur surgissement. Le caractère essentiel de ses oeuvres est qu’il ne crée pas des objets ni des espaces mais plutôt des lieux produits dans leurs «états naissants». Autrement dit des sculptures qui, tout en étant finies, tendent à rester ouvertes. Elles affirment plutôt la séparation où elles veulent se tenir entre agent, action et résultat.

Oeuvres majeures de Giuseppe Penone

Rovesciare i propri occhi, 1970
Portrait-œuvre de l’artiste, où il se met en scène avec des verres de contact miroitant.
Pommes de terre, 1977. Travail sur la notion d’empreinte, conservée avec du bronze.
Soffio 6, 1978. Moulage du corps de l’artiste.
Etre fleuve, 1992. Sculptures de pierres, à partir de véritables rochers polies par l’érosion de l’eau.
L’arbre aux voyelles, 1999
Moulage en bronze d’un chêne de 14 mètres de long (commande d’état récemment installé au Jardin des Tuileries).
Cèdre de Versailles, 2000 – 2003
Taille d’un arbre en fonction des cernes de croissance.
Elevazione, 2001.
Sculpture d’un arbre en bronze.
Il giardino delle sculture fluide, 2003 – 2007
Important ensemble de sculptures dans le jardin du château de Venaria, près de Turin.

Sources