Terry Riley

Terry Riley, né le 24 juin 1935 à Colfax en Californie, est un compositeur contemporain américain. Il est considéré comme un des fondateurs de la musique minimaliste, courant de la musique contemporaine, et l’un des compositeurs les plus influents de la musique classique aux États-Unis.

En France, la musique minimaliste est appelé musique répétitive, et désigne plus spécifiquement l’ensemble des œuvres utilisant la répétition de courts motifs mélodiques, harmoniques ou rythmiques comme technique de composition.

Formation et évolution musicale

Terry Riley est né avec une oreille musicale et un talent prononcé pour la composition et l’improvisation. Ses parents vont l’encourager à continuer dans cette voie. À 6 ans, le jeune Terry est capable de jouer l’hymne de la Marine américaine au violon. À 8 ans, il débute le piano et étudie la musique classique avec des petites pièces de Jean-Sébastien Bach.

Après la Seconde guerre mondiale, il poursuit sa formation musicale au Shasta College puis au lycée de San Francisco où son professeur lui fait découvrir Bela Bartok et surtout Stockhausen dont les travaux électroacoustiques autour de la spatialisation l’inspirent pour ses premières créations musicales.

En 1959, il entre à l’Université de Berkeley, en classe de composition, il fait la connaissance de La Monte Young avec qui il se lie immédiatement. Ce dernier a joué un rôle important dans la musique contemporaine et expérimentale. Il a beaucoup collaboré avec des artistes du mouvement Fluxus.

Pour Riley, la rencontre avec La Monte Young revêt une dimension initiatique. Elle va lui ouvrir de nouveaux horizons, aussi bien musicaux que philosophiques. Avec son mentor, il explore la richesse polyrythmique de Stockhausen et l’art conceptuel de John Cage.

Le Trio à cordes de La Monte Young inspire à Riley son Quatuor à cordes (1960) puis son Trio à cordes (1961) où l’on remarque déjà une tendance à la répétition de courtes phrases et de rythmes réguliers dans un contexte modal.
En 1961, Terry Riley compose Mescalin Mix, une danse dans laquelle il utilise un magnétophone à bandes pour créer des boucles (tape-loops) de diverses origines sonores. Il y introduit des effets d’écho (tape-delay) et prend conscience que la répétition peut être un processus de création musicale.

Terry Riley porte aussi un grand intérêt au jazz. Il est également fasciné par les pièces de piano d’Arnold Schoenberg, la musique sérielle semble alors aussi offrir un formidable espace de liberté. Vers 1963 il déménage à Paris où il gagnera sa vie en étant pianiste de jazz dans des clubs de Pigale.

Pendant ce temps, il expérimente l’utilisation des bandes magnétiques, notamment avec l’australien Daevid Allen.

Puis il conçoit, avec l’aide d’un ingénieur de l’ORTF, le Time-Lag Accumulator qui permet autant de répétitions de motifs musicaux que l’on veut. Il s’en sert pour composer Music for The Gift, une œuvre dans laquelle il mixe les partitions des instruments de Chet Baker jouant So What de Miles Davis.

À travers ce travail sur les bandes magnétiques, Riley développe progressivement un mode de composition et d’improvisation basé sur la répétition de courtes cellules mélodiques.

L’œuvre considérée comme fondatrice du minimalisme est In C composée en 1964.
Elle présente un concept alors inédit : la partition est uniquement composée de 53 phrases musicales, les musiciens doivent jouer chacun de ces motifs, et le répéter autant de fois qu’ils le veulent avant de passer au motif suivant. Il n’y a aucune contrainte sur le nombre minimal ou maximal de répétitions. Ainsi, la partition de

In C tient sur seulement une page, et les représentations de cette pièce musicale oscillent entre 45 minutes et 1h30. La durée et les procédés répétitifs d’In C, mettent au défi notre perception de l’espace et du temps.
La répétition est au c’ur des mécanismes propices à l’hypnose ou à la transe, caractérisées par l’accession à un état modifié de la conscience. Il est difficile d’oublier qu’au moment de la création d’In C, drogues et autres substances hallucinogènes circulent beaucoup, particulièrement dans les milieux artistiques.
Cependant, si Terry Riley admet en avoir fait l’expérience, la musique en elle-même est investie de pouvoirs spécifiques.

Terry Riley a d’ailleurs évoqué ce fait : « Je pense que ce que j’expérimentais dans la musique à cette époque était un monde nouveau. À côté de la musique ordinaire qui poursuivait son chemin, la musique était aussi capable de nous transporter soudain d’une réalité à l’autre. De nous transporter au point d’avoir presque des visions en jouant. C’était ce à quoi je pensais avant d’écrire In C. »

C’est durant les années 1960 que Terry Riley inaugura les All-Night Concerts, durant lesquels il jouait, essentiellement en improvisant, de la nuit tombée jusqu’au petit matin suivant. Il utilisait un vieil harmonium (rafistolé avec un moteur d’aspirateur) et un saxophone couplé à un enregistreur magnétique. Ce type d’enregistreur modifié permet de repasser en boucle, avec un retard, le son immédiatement enregistré. Quand il voulait faire une pause, après des heures de jeu, il faisait jouer en boucle des fragments de saxophone enregistrés dans la soirée.
Il invitait les gens à venir dormir, méditer, passer un bon moment tout en écoutant son improvisation.

Ce travail avec des bandes magnétiques et un piano électrique, marqua aussi une œuvre très importante de Riley : A Rainbow in Curved Air.

Durant sa carrière, Terry Riley a composé 13 quatuors pour cordes, en plus d’autres œuvres.
En Musique classique un quatuor à cordes est un ensemble musical composé de quatre instruments à cordes généralement deux violons, un alto et un violoncelle.
Le Quatuor pour cordes fut la première composition de cette nouvelle période, très vite suivi d’un trio pour cordes, dans lequel il employa pour la première fois de courtes phrases répétées. Riley est considéré, pour cette raison, comme l’un des pères fondateurs de la musique minimaliste.

À partir de 1970, Riley étudie la musique et le chant hindou qu’il considère comme une source d’inspiration pour l’improvisation. Son plus influent professeur fut Pandit Prân Nath, un maître du chant classique indien avec lequel il jouera jusqu’au dernier soupir de ce dernier. Terry Riley commença à enseigner la musique indienne à la faculté du Mills College en 1971. Aujourd’hui encore, il professe le chant Ragga indien et l’introduit même dans une version de

In C avec Doug Aitken.

C’est à la même époque qu’il commença une collaboration avec le « Chronos Quartet » et son fondateur David Harrington, composant de nombreux quatuors dont Sun Rings (2002), une commande de la NASA qui sera enregistrée dans l’espace.
Terry Riley est un des fondateurs de la musique minimaliste mais pas seulement, c’est un artiste hors paire avec des centaines de travaux musicaux à son actif. C’est grace à toutes ces connaissances aussi bien orchestral, classique, avant gardiste, expérimentale, occidentale, qu’il réussit à faire de ses compostions des voyages modernes et nouveaux.

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Quelques œuvres remarquables


Music for the Gift III (1963)

En 1963, Terry Riley collabore avec le dramaturge Ken Dewey pour sa pièce The Gift et avec le trompettiste Chet Baker pour réaliser la bande de Music for the Gift (1963) à partir du célèbre « So What » de Miles Davis. il accompagne le trompettiste avec un montage en boucle des intruments de l’orchestre (trombone, basse, batterie) auxquels il ajoute des sons concrets et des voix.
C’est à travers ce travail sur les bandes magnétiques ? mis au point dans les studios de l’O.R.T.F. à Paris ? que Riley développe progressivement un mode de composition et d’improvisation basé sur la répétition de courtes cellules mélodiques.


Composée en 1964, In C est une œuvre monumentale de plus de 45 minutes adoptant un concept inédit : la partition comporte 53 phrases musicales dont les musiciens doivent jouer chacun des motifs et le répéter un nombre de fois indéfini avant d’enchaîner avec le suivant. Ils ont une totale liberté quant à l’interprétation de la partition qui tient sur une simple page.
Le nombre d’instruments jouant la pièce est indéfini, même si un groupe de 35 soit idéal. Pourtant, l’enregistrement original ne comporte que onze musiciens, la technique de l’overdub permettant d’ajouter des dizaines d’instruments.

Persian Surgery Dervishes (1972)
https://www.youtube.com/watch’v=sqQ59i4PmGE

C’est lorsqu’il commence à étudier le chant indien avec Pandit Pran Nath au début des années 70 qu’il enregistre

Persian surgery dervishes//, longue improvisation à l’orgue seul : ?J’étais fasciné depuis longtemps par la musique indienne, mais cela prend du temps de l’étudier car elle n’est pas notée. Il n’existe pas d’ouvrages théoriques.
Dans cette œuvre, il joue sur la durée, inspiré par les cérémonies soufis, cherchant à mener son auditoire à une extase mystique.

Sun Rings (2002)

https://www.youtube.com/watch’v=GUlMyYuEyXw

La dernière pièce en date composée par Terry Riley s’intitule

Sun Rings//. C’est une commande de la NASA écrite pour quatuor à cordes par le compositeur comme une ode à la terre et son peuple. Elle est ici interprétée par le Kronos Quartet de San Francisco. Jouée par les instruments à cordes, elle est aussi chantée par des ch’urs et comporte des bruits célestes, des sons enregistrés dans l’espace et des images cosmiques.
Sun Rings fut interprétée en 2009 lors de la cérémonie d’ouverture de l’Année mondiale de l’astronomie par le même quatuor.

Références

Ressources ircam : http://brahms.ircam.fr/terry-riley

Artwiki, ressource sur l’art et support pour un enseignement ouvert et participatif utilisé par les étudiants en arts : https://www.artwiki.fr/wakka.php’wiki=TerryRiley

Arte, chaîne thématique de télévision franco-allemande : http://www.arte.tv/fr

Néosphères, les sphères des nouvelles musiques : http://neospheres.free.fr/minimal/riley.htm

Lexique

Overdub : ajout d’une partie musicale nouvelle à une partie enregistrée, à l’aide d’un séquenceur ou d’un magnéto multipiste ; ainsi, les deux parties se superposent.

Tape-Delay : procédé par lequel on diffuse avec un décalage variable dans le temps un signal sonore ou visuel.

Raga : concept central de toute la musique indienne qui peut être défini comme un thème précis ornementé sur lequel on peut improviser

Bibliographie

Répétitions : L’esthétisme musicale de Terry Riley, Steve Reich et Philip Glass

Auteur : Johan Girard
Éditions : Broché
Date : 7 juin 2010

Gabrielle GIRAUD – Mégane STRECK – Article complété par Roxanne HELIE, étudiante en L2 EPF à la Faculté Paul Valéry (Montpellier, 2015)