Internet
C’est dans les années 90 que l’Internet en temps que Web se développe et se démocratise, c’est l’émergence des sites web, les prémices du partage et d’échange de données telles que les images, les textes etc.. Le système de communication prévu au départ pour les militaires voit son utilisation originelle être transformée au profit de l’utilisation quotidienne par tout un chacun. C’est le seul moyen de communication réparti sur toute la planète, ce qui permet de toucher un plus grand nombre de personne que la télévision, les journaux et ne pose pas de problème au niveau accessibilité de la population. De plus aujourd’hui grâce aux smartphones, par exemple, ou par le biais des nouvelles technologies, Internet n’est plus consultable qu’à partir d’un ordinateur.
Grâce à l’explosion d’Internet et de ses nombreuses possibilités, le Net Art s’est développé de façon exponentielle ces dernières années. Par convention on va limiter le Net Art aux peintures et aux photographies alors qu’il comprend aussi les musiques, les vidéos, des images animés, sites web… Il s’agit en fait de toutes les œuvres créées pour, par et avec Internet. Ces œuvres produites peuvent être consultables par toute personne possédant une connexion à Internet. Cependant, les œuvres dites » matérielles » et qui sont numérisées par des moyens techniques tels que le scanner ou la prise de celles-ci en photo ne sont pas considérées comme étant du Net Art.
La difficulté de définir le Net Art tient à la difficulté de préciser ses modes de conception, de création et aussi de diffusion. Ainsi,de nombreuses galeries sans existence physique naissent sur le réseau Internet, pour y proposer, produire, hors le circuit ordinaire du marché et des réalisations traditionnelles. L’univers du Net Art est en quelque sorte « l’art en réseau », c’est-à-dire à l’inscription de pratiques anciennes sur un support inédit, mais aussi s’élargissant au concept de « l’art en ligne » qui suppose des modes de création diverses.
La nouveauté du mouvement est peut-être la disparition de l’atelier de l’artiste, ou son remplacement par Internet, de « forum atelier ». Étant, outil de production et support de diffusion, Internet regroupe un gigantesque univers de blogs et forums animés par les artistes eux-mêmes, tel l’anglais Heath Bunting, Vuk Cosic et Joan Heemskerk.
Ce mode d’Art permet aux artistes une certaine indépendance au niveau des sujets, il y a donc une grande variété de sujets possibles, et des institutions car ils peuvent les vendre à des prix abordables et n’ont plus à attendre auprès de celles-ci.. De plus, vu la facilité d’accès des œuvres, il y a plus de visiteurs et donc d’acheteurs potentiels que si l’artiste était exposé dans une galerie ou un musée. Internet est utilisé comme mode de diffusion mais aussi comme espace de création et d’existence des œuvres.
Au vu de la difficulté de recenser toutes les œuvres du Net Art il n’y a pas à proprement parlé d’histoire du Net Art
Définitions des termes
Les termes caractérisant les œuvres sur Internet sont multiples, n’ont pas tous les mêmes significations et ne désignent pas les mêmes choses.
Voici les termes les plus souvent usités aujourd’hui pour définir cette catégorie d’Art.
Récemment on a vu le terme de » Internet Art » ou » Art Internet » selon un conservateur et commissaire d’exposition britannique Julian Stalabrass qui le définit comme ceci » écrire à propos de l’Art sur Internet revient à essayer de fixer en mots un phénomène extrêmement instable et changeant. Cet Art est inextricablement lié au développement d’Internet lui-même, dévalant le torrent du fou progrès technologique qui ramène l’illumination des anciennes visions du modernisme, arraché de la matière et jeté dans l’éther, et ainsi rendu soudainement et curieusement nouveau. […] L’Art lui-même est un terme contesté – rejeté par certains qui ont été appelés « Net Artistes » – et c’est seulement utilisé ici timidement, comme un terme commode qui permet d’examiner un certain nombre de phénomènes. Sa cohérence peut seulement être jugée plus tard. « Net Art » est un terme qui est devenu associé avec un petit groupe parmi les premiers praticiens et un style particulier, et il ne peut pas être appliqué à l’ensemble de l’Art en ligne. Par conséquent, j’utiliserai, sans vouloir faire grande prétention de cette expression, « Internet Art » [ou Art Internet]. «
Le terme de Web Art quant à lui ne concerne que les sites Web, il n’englobe donc pas toutes les formes d’Art.
Le terme le plus utilisé et le plus ancien est celui du Net Art ou Net. Art. Même si de nombreux artistes ne cautionnent pas ce terme, il reste encore d’actualité.Ce terme était le seul existant au commencement du Net Art, il a été rendu célèbre par la net artiste russe Olia Lialine mais aussi par Alexei Shulgin. Néanmoins certains le désigne comme du » ready-made » : l’artiste ne crée pas l’œuvre il prend un » objet manufacturé » et le désigne comme étant une œuvre d’Art. Il va le transformer selon ses propres goûts, changer son contexte et s’approprier la paternité de l’œuvre. Cette appellation est imprécise et ambiguë mais reste la plus usitée malgré le fait qu’elle ne désigne pas tout l’Art en ligne d’aujourd’hui.
Contexte historique
Dans les années 70, et donc bien avant qu’Internet n’existe sous sa forme actuelle, on observe une sorte d’intuition des artistes de mettre en application les concepts qui formeront le Net Art. Avant d’être connu comme un moyen de création, il était surtout connu comme un support qui permettait de diffuser des œuvres, comme vecteur d’information.
Les artistes Français furent les premiers à utiliser le minitel (vidéotex) comme médium de réalisation d’œuvres.
Le générateur Poeïtique de Olivier Auber en 1984 Il s’agit d’une sorte de jeu où tous les participants peuvent voir ce que font les autres, le but étant de créer collectivement des formes reconnaissables et de regarder le résultat.
L’esthétique de la Communication
Anne Couey crée en 1986 un réseau autonome conçu pour des » œuvres d’Art en tant que système organique de communication » appelé Art Com Electronic Network.
Une des toutes premières œuvres du Net Art met en garde, déjà, contre la tendance à admettre trop facilement comme fiables, légitimes et vraies toutes les données qui sortent des ordinateurs. Il s’agit de l’œuvre de Judy Mallow en 1986 « Bad Information ».
Durant les années 90 on voit une grande révolution technologique de l’information se mettre en marche, ce qui ne laissera pas les artistes impassibles et entraînera avec elle la création d’autres médiums liés à la technologie.
Les artistes utilisant le médium de la vidéo sont les premiers à utiliser la technologie de part ses caractéristiques : transmission d’information, interdisciplinarité, processus collaboratif et permet une meilleure transmission au public que les autres supports.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, les artistes dits d’installations ont aussi inspiré le Net Art. L’interactivité qu’il existe entre l’artiste et le public n’existe pas dans les autres médiums et la sensation d’évoquer des sujets de la vie quotidienne est très présente dans les œuvres du Net Art d’aujourd’hui. On observe aussi la forte présence du » ready-made » dans l’Art d’installation : de nombreux artistes ne font qu’apposer leur noms et affirmer comme Marcel Duchamps » ceci est une œuvre d’art » lorsqu’il désigne ses œuvres, il est en effet le créateur de ce style d’Art.
Les caractéristiques de ces styles d’art sont présentes dans le Net Art : son interface permet une grande interactivité artiste/spectateur, l’appropriation à outrance d’œuvres d’art par des artistes qui n’en sont pas forcément les créateurs ainsi que la facilité de transmission de l’information et des œuvres. Le Net Art inspire aujourd’hui de nombreux artistes et permet des avancées majeures dans l’art.
Origine du Web Art
Les premiers artistes utilisant Internet étaient des artistes ayant l’habitude d’utiliser des médiums » physiques » tels que la peinture, la photographie ou les Arts traditionnels pour tester les nouveaux instruments que propose la mise en place d’Internet. Ces avant-gardistes du Net Art, expérimentent de nombreuses possibilités et posent les bases du Net Art. On distingue deux catégories d’artistes : ceux qui utilisent le Net Art comme un moyen de transformer les modes de communication traditionnels et ceux centrés sur le langage informatique et l’esthétique propre à l’informatique et à l’ordinateur. Ces artistes apportent une grande importance à l’aspect ludique des œuvres et permettent aux spectateurs de participer à leurs œuvres.
Malgré le fait que ce type d’Art se » passe » sur Internet, on peut voir des rassemblements traitant de l’Art technologique, et donc aussi du Net Art, un peu partout dans le monde. Ces rassemblements qui se déroulent en grande majorité en Europe, plus précisément en Europe de l’Est, sont assez rares mais ont permi de faire connaître e l’Art Internet. Il existe des centres et des institutions spécialisés dans les Arts technologiques :
- TO à Vienne
- C3 à Budapest
- Backspace à Londres
- ZKM à Karlsruhe
- La Waag Society à Amsterdam
- Walker Art Center à Minnéapolis
- Postmaters Gallery à New York
Mais il existe aussi des festivals spécialisés :
- Next 5 Minutes qui se déroule chaque année à différents endroits
- Ars Electronica à Linz (Autriche)
- Transmedial à Berlin
C’est au travers ces événements que les artistes se rassemblent et échangent leurs idées. Cela leur a permis de former une nouvelle communauté appelée » new media Art « .
1994 Waxweb de David Blair, premier site artistique participatif, évolutif et toujours en activité de nos jours.
1994 King’s cross phone In de Heath Bunting
Bunting met en ligne une liste des numéros des cabines téléphoniques entourant la gare de King’s Cross. Il nous invite ensuite à les composer selon des modalités bien précises créant ainsi un événement dans cet espace public fréquenté de Londres.
Son originalité est de mettre en avant la dimension artistique de cette page Web en tant que plate-forme de création collaborative et internationale.
1996 : Ozone de Stéphan Barron, la première œuvre qui utilise le ftp
Elle sera suivie d’une nouvelles version ooo en 2008
L’influence russe
Les avant-gardes russes ont eu une grande importance sur le Net Art de part le fait qu’en Russie Internet était une ouverture vers le monde pour communiquer après la chute de l’URSS. L’introduction facile de ce nouveau moyen de communication n’a été possible que grâce au changement politique. Cependant il n’est pas vu comme un outil économique et universitaire contrairement au reste de l’Europe car il fut introduit seulement pour la communication. De plus, l’histoire russe du cinéma avant-gardes a aidé les artistes à continuer dans leur expérimentation des Arts technologiques, renforcé aussi par le dénis de leur Arts locaux.
Les avant-gardes russes sont connus pour appartenir à la classe des Net Artistes utilisant le langage Internet pour critiquer la culture traditionnelle. Ils créent des pages Web minimalistes avec principalement du texte et des éléments graphiques basiques. Leur promotion et la distribution des œuvres sont faites par les moyens que leur offre Internet.
- 1994, Hot Pictures de Alexei Shulgin.
L’artiste définit et conçoit ce site comme une » galerie de photos électroniques « . À une époque où la relation entre Art et Internet n’était pas évidente, il établit une véritable exposition en ligne. Il vise également à brouiller et mélanger les frontières entre les disciplines picturale, photographique et informatique. - 1996, My boy friend came back from the war, de Olia Lialina .
Elle propose un récit romantique sur fond de guerre. Elle utilise pour le présenter un programme qui divise la fenêtre en plusieurs parties. Sur fond noir apparaissent des images et du texte cliquables. On découvre donc cette histoire par notre action sur la page Web que l’on découvre simultanément. L’utilisateur s’inscrit de façon à part entière dans le processus de création.
Les premières vraies créations : les grands principes
Le Net Art fut utilisé par des artistes qui rejetaient l’Art traditionnel et essayaient de nouveaux système, de nouveaux médiums. L’émergence d’Internet a agit comme une grande vague au niveau révolution artistique. Ce médium étant en perpétuelle évolution, il est très difficile de garder un contrôle sur son œuvre et la durée de celle-ci, Internet est un Art quasiment éphémère. Les artistes vont donc s’interroger sur les différentes façons de mettre leur production en avant afin d’exploiter artistiquement tout ce que peut offrir ce support virtuel. Ils vont mettre en avant les codages des sites web (HTML), les protocoles qui ne pourraient exister sans leur mise en ligne, leur but premier étant tout d’abord le coté créatif du rendu plutôt que du contenu.
1993, Handshake réalisé par les Allemands Joachim Blank, Karl Heiz Jeron, Barbara Aselmeir et Harmin Haase. (dont le site n’est plus actif)
Ce site était le précurseur des plates-formes en ligne d’Art. Les artistes y postaient leurs œuvres dans des catégories que les créateurs du site avaient répertorié.
- Malgré le fait que de nombreux Net Artistes cherchent à introduire une forte réflexivité dans leurs œuvres, d’autres cherchent à continuer à satisfaire le coté « pictural » traditionnel pour se rapprocher d’une culture picturale dont ils sont » originaires « . En voici quelques exemples :
- l’univers fragmenté, pixelisé de certaines œuvres (JODI. org) peut faire penser au pointillisme de Seurat (XIXème)
- les modifications de photos (grâce à Photoshop) ou le collage de plusieurs photos en assemblage de formes et de couleurs différentes se rapprochent du surréalisme de Brauner (XXème)
- les nombreuses textures numériques qu’offrent les logiciels ou même Internet peuvent être mises en parallèle avec la technique du » frotting » de Max Ernest (début XXème)
- Les formes dynamiques de certains web Art prennent leurs origines à l’ » action painting » de Jackson Pollock (début XXème) ou la peinture gestuelle de Georges Mathieu(XXème)Jakson Pollock
Action painting de Jackson Pollock. - Le chevauchement des techniques ainsi que les hybridations ne permettent pas de classer les Net Artistes de façon arbitraire car cette classification serait aléatoire et provisoire.
Les liens hypertextes
1990 Grammatron Mark Amerika
Il s’agit d’un projet regroupant des données sonores, écrites, comprenant des liens hypertextes. Ces données vont composer une histoire narrative en jouant sur les différents liens hypertextes sur le thème du cyberespace où les récits ne sont plus conçus de manière » traditionnelle » mais créés sur la toile en temps réel pour un réseau.
Par cette histoire, il veut montrer qu’Internet remet en question la façon dont un texte peut être vu, interprété, distribué.
link X
1996 Link X de A. Shulgin
Il s’agit d’une œuvre de classement qui permet de mettre en avant les connections déroutantes entre un site et une recherche basée sur un mot. L’œuvre consiste en une liste qui regroupe des noms de domaines, des adresses IP classées par thème où chacun est lié à un site Internet qui a un rapport plus ou moins loin avec le mot clé.
1996 _readme.html de Heath Bunting est une référence au titre des guides d’utilisation des logiciels.
Il s’agit probablement de la biographie de Heath Bunting où quasiment tous les mots sont des liens hypertextes renvoyant à des sites commerciaux sans aucun lien avec le texte en lui-même. Il s’inspire de l’œuvre d’Olia Lialina (Teleportica). Il veut montrer que, comme Internet, une œuvre n’a pas de frontières et peut mener n’importe où.
Les deux dernières œuvres sont centrées sur un mouvement de classement qui pourrait paraître aléatoire mais qui est très organisé et pertinent.
Questionnement du médium :
On voit aussi l’émergence de pages totalement abstraites ayant des » sens » cachés.
1995 Joan Hemmskerk et Dirk Paesmans
OSS
Cette œuvre a un rapport avec la pratique des hackers. Elle va » prendre en otage » l’ordinateur, des fenêtre vont s’ouvrir de part et d’autre sur l’écran et l’utilisateur ne pourra plus intervenir sur son ordinateur jusqu’à ce que celui-ci plante. Ils veulent montrer que l’informatique ne doit pas être idéalisé.
jodi
JODI. org
Contrairement à l’œuvre précédente, celle-ci obéit totalement à l’utilisateur. C’est une interface en ligne proposant la représentation des protocoles, des codes et des systèmes opérationnels. Il renverse ici le processus de programmation et d’affichage d’une page web à partir du code source html. Il suffit de renverser ce code qui apparaît de façon picturale et abstraite pour voir apparaître une image ou un schéma scientifique (celui de la Bombe H notamment).
Par ces deux œuvres, on peut voir que de part sa réflexion et son interactivité le Net Art devient petit à petit une véritable forme d’Art.
Les artistes veulent déranger l’utilisateur, le détourner de ses pratiques habituelles.
Ce genre d’œuvre demande beaucoup de réflexion pour l’artiste surtout pour manier les protocoles informatiques et exploiter le maximum des possibilités. Cela permet ainsi de voir les premières interactions avec l’utilisateur : si l’utilisateur ne cherche pas à cliquer sur les liens hypertextes, ceux-ci ne servent à rien. L’œuvre existe alors uniquement par la participation de l’homme.
Documentation
On voit aussi apparaître des formes très inattendues d’utilisation des pages html comme moyen documentaire et artistique. La page web se substitue aux expositions en concentrant les informations sur un thème. Cette catégorie d’œuvre est un appel des artistes afin de découvrir de nouveaux espaces sur le globe et permet de ce fait aux utilisateurs de » voyager » grâce à eux.
1995 The Hiroshima project de Akke Wagenaar (NL)
(il n’existe plus de liens vers l’œuvre, donc voici un article à son propos)
Cette œuvre présentée à Ars Electronica en 1995, compile toutes les informations, médias, images sur ce tragique événement. Les données et témoignages rassemblés apparurent bien souvent contradictoires.
Hackisme
Bien entendu avec la naissance de cette nouvelle forme d’Art sont apparues les personnes contre le Net Art, plus précisément contre ce qu’entraîne Internet et le début de la société de consommation. Il s’agit d’un groupe d’activistes qui vont utiliser l’Art conceptuel (qui a beaucoup inspiré les artistes du Net Art), l’Art télévisuel etc, et le détourner pour faire passer un message et faire la critique sur ce nouveau médium.
1996 » Net.Art per se » une œuvre de Vuk Cosic.
Cet artiste militant yougoslave présente son premier projet en 1996. Il s’agit d’un faux site commémorant une pseudo conférence sur le Net Art. Pour donner du crédit à cela, il exploite une réplique du site Internet de CNN.
On voit apparaître des » Google hacks « . Il s’agit de dispositifs artistiques et des programmes informatiques qui détournent Google de ses fonctionnalités tout en révélant les dimensions contraignantes et cachées.
2001 Épiphanies Christophe Bruno
Il détourne les fonctionnalités et les usages du moteur de recherche Google en créant à partir d’un mot clé une série de poèmes. Sur le point technique, il va parasiter l’algorithme de Google afin de collecter des morceaux de phrases sur Internet qui vont ensuite être ré-agencés comme des petits poèmes aléatoires. L’artiste doit toujours mettre à jour son algorithme du fait que Google essaye en permanence de contrer son hack. L’œuvre demande donc beaucoup d’attention de la part de l’artiste.
Ephipanies
Les différents modes de création
Le net regorge de sites d’Art (encyclopédie, galeries virtuelles ?) mais il contient aussi des œuvres d’Art spécialement conçues pour le médium qu’est Internet. Ce sont ces œuvres qui sont considérées comme Net Art. Cette pratique recouvre une multitude d’expérimentation et chaque artiste développe son propre style. Certaines œuvres exploitent le médium informatique du coté esthétique en utilisant l’ » Art du code « . Tout est dans le rendu que donne les codes et les spécificités de chacun. D’autres artistes restent dans le coté plastique, plus » classique » de l’Art (Art pictural, musical…). Même si leur contenu sont différents, les modes de création restent les mêmes. La typologie prise ici est basée sur le coté élaboration des œuvres et non sur leurs contenus esthétiques et leurs raisonnements logiques. Ce classement reste totalement provisoire et peut être soumis à des modifications avec le temps. On peut distinguer quatre sortes de mode :
- Créations statiques : il s’agit d’une composition d’une ou plusieurs pages HTML que l’utilisateur ne peut pas modifier. Les pages restent fixes et l’utilisateur parcourt l’œuvre en cliquant sur des liens hypertextes. Ces types de créations entraînent l’utilisateur au c’ur du système informatique et du réseau en exploitant les différentes possibilités des codes. 1996 Mouchette Martine Neddam
Il s’agit à première vue, d’un site d’une adolescente de presque 13 ans qui nous invite à naviguer entre les pages de son site, celles-ci vont s’avérer de plus en plus sombres. Grâce à une partie de son site interactif elle peut garder un contact avec son public. L’artiste est restée secrète jusqu’en 2010 avant de révéler sa véritable identité. Le site possède une » pièce » qui fonctionne sur la génération de courrier électronique vers les adresses email contenues dans la base de données du site. Ces messages vont contenir des invitations pour des œuvres uniquesscreen et personnalisées que l’on ne peut voir qu’une seule fois. L’œuvre n’est pas la page web ou le système de courrier électronique mais un juste milieu entre les deux. Le site de l’artiste se révèle, au point de vue technique, d’une grande complexité pour les serveurs.
2002 Blue Screen Olivier Schneider
Il s’agit d’un site expérimental qui désoriente l’internaute dans ses habitudes de navigation. - Créations interactives : par l’utilisation de touches et de clics sur l’œuvre, l’internaute va modifier l’œuvre programmée par l’artiste. La durée d’exécution de ses œuvres est indéterminée. 2001 ? 2009 Flying Puppet Nicolas Clauss
C’est une série de tableaux interactifs, basés sur les Arts plastiques, qui bougent selon les clics de l’utilisateur.
Flying puppet 2003 : Square 4_4 [sp11] Peter Luining
C’est une animation minimaliste sonore et visuelle que l’internaute fait bouger. - Créations génératives : ce sont des créations artistiques, basées sur des algorithmes, qui s’exécutent toutes seules et qui produisent des objets automatiquement. Ces œuvres ainsi créées sont générées sur la base d’un encodage fait par l’artiste. On peut les classer en deux sous-groupes : les automatiques (les œuvres sont totalement autonomes) et les semi-automatiques (les œuvres tiennent compte des actions des utilisateurs)
- créations automatiques : génératives 2000 Riot Mark Napier
Il s’agit d’un navigateur qui va créer des pages à partir d’une combinaison d’images, de textes et de liens récemment visités par les autres utilisateurs du programme.
riot 2002-2005 Poetic Dialogues 1.0 Yucef Mehri
Le projet est constitué de » flash movies « . Chacun de ces flash est une série d’images prises mouvement par mouvement de personnes récitant des vers que l’artiste a écrit. Il y a trois différentes têtes qui établissent un dialogue entre elles, l’interaction des trois personnages crée un nouveau poème, le nombre de combinaisons possibles est de 336. - créations semi-automatiques : convertisseur 2003 Sveriges Radio Erik Bünger
Il s’agit d’un juke-box qui convertit les phrases des utilisateurs en musiques (essentiellement en anglais). 2012 Woogles Gu Jian
Un détournement du célèbre moteur de recherche qui convertit les mots en images.
woogles - Créations participatives ou collaboratives : Les œuvres reposent sur la participation (volontaire ou non) des internautes. Elles naissent et se modifient au gré des interventions des internautes en ligne. Il s’agit en effet de la coopération de plusieurs personnes qui vont agir à l’unisson. Même si l’utilisateur » déambule » dans l’œuvre, la modifie, il ne maîtrisera pas le résultat obtenu. 2003-2007 Audiogame de Marc Em
Le rôle de l’utilisateur est de choisir plusieurs séquences vidéo. Il a la possibilité de modifier les effets sonores des images en mouvement à l’aide de boutons qui sont à sa disposition. 2006 Frespech Nicolas Frespech
Les internautes écrivent une pièce de théâtre tous ensemble. 2010 Nos Vies Hervé Nisic
Il s’agit d’un film composé des photos que les internautes ont envoyé.
nos vies
Le problème de conservation
Afin de pouvoir conserver une œuvre de Net Art, il faut déterminer les éléments qui la composent. On distingue le code source mais aussi le design visuel, la manière dont le spectateur va percevoir l’œuvre.
De nombreux paramètres peuvent changer la façon de voir les œuvres : la version du navigateur, le débit internet, la conservation des sites qui composent sa dépendance (les liens qui la composent), les capacités de l’ordinateur (système d’exploitation, puissance…). Tous ces paramètres évoluent rapidement et sont pris en considération lorsqu’on parle de la conservation des œuvres. L’artiste ne va pas contrôler la manière dont son œuvre sera perçue. Il ne s’agit pas d’installations dans un lieu d’exposition et donc rien de statiques. Ceci explique peut-être pourquoi certains artistes vont créer différentes versions de leur œuvre pour qu’elle soit le plus compatible possible selon le changement de navigateur, de système d’exploitation…
Les supports numériques demandent beaucoup d’attention car ils évoluent très vite. Les sociétés dont ils sont originaires sont plus attirées par le côté financier et non celui de la durabilité. Les œuvres dépendent donc de beaucoup de paramètres qui n’ont pas les mêmes objectifs. Certains logiciels payants qu’utilisent les artistes doivent être utilisés pour consulter les œuvres. Les musées doivent donc se tenir à la » page » pour pouvoir les exposer et les consulter. Certains musées ne pourront donc pas se les procurer et les exposer.
La délimitation des œuvres
Certaines pièces d’œuvres sont en constante évolution, soit parce que des utilisateurs mettent du contenu en ligne, soit que l’artiste doit effectuer des mises à jour fréquentes pour qu’on puisse toujours le consulter. Certaines informations ne dépendent pas uniquement des liens. Les artistes eux-mêmes ne connaissent pas toujours les limites entre l’environnement qui les entoure et les œuvres qu’ils ont crées.
Par exemple pour Épiphanies si le moteur de recherche venait à disparaître, l’œuvre n’aurait plus raison d’exister. On peut se demander si, en plus de l’œuvre, il faut garder en mémoire le code du moteur. Les pages externes aux œuvres peuvent aussi disparaître, la durée de vie d’une page web étant limitée. On peut se rendre compte en consultant les œuvres que de nombreux liens externes renvoient vers des pages « 404 not found » disant que la page a été supprimée, par exemple Link X.
La délimitation des œuvres n’est donc possible que si l’on garde le contexte original de création : ses auteurs, son adresse (URL), si elle a été créée en collaboration avec d’autres artistes, s’il existe un rapprochement entre les œuvres de l’artiste déjà créées, de connaître les techniques utilisées pour la création du Net Art etc…
La ? transformation continuelle [d’Internet] fait que beaucoup d’œuvres d’Art en ligne, particulièrement celles qui contiennent de nombreux liens externes (à l’œuvre), ressemblent moins à des objets d’Art qu’à des interventions temporaires. […] Voir la décomposition rapide de telles œuvres en ligne non « entretenues » est comme assister, en accéléré, à la désintégration d’une fresque, comme si des fragments de plâtre étaient en train de tomber devant nos yeux. Et même les pièces qui se veulent fixes, figées ne restent pas inchangées longtemps. Le caractère de ces œuvres plus permanentes est plus proche du graffiti que de la performance, étant donné qu’elles laissent des traces en perpétuelle mutation mais assez durables qui ont une incidence sur ce qui vient après elles. Comme le graffiti, elles se dégradent avec leur environnement, et leur déclin et leur destruction à long terme font partie intégrante de leur attrait.? Julian Stallabrass
Une hypothèse existe pour créer des Net Art durables : il faudrait préférer des systèmes ouverts dirigés par des communautés, préférer les formats de texte bruts plutôt que ceux en binaires ainsi que préférer les multiplateformes, encourager la duplication de l’œuvre, ainsi que garder le fichier source sur des médias durables et différents.
La conservation des œuvres
Certains Net Artistes sont contre la conservation de leur œuvres.
Notre société valorise la conservation et le patrimoine, au risque de la saturation. Le fait que certaines œuvres passent et soient oubliées n’a peut-être pas d’importance, surtout lorsqu’elles ne prétendent pas devenir des monuments. Ce n’est pas nécessairement un danger pour l’Art. Olga Kisseleva.
Il est cependant nécessaire de garder les traces des œuvres pour que les générations futures puissent connaître les expérimentations passées.
Les musées s’intéressent depuis plusieurs années à la question de la conservation du Net Art. Ils peuvent exposer ces œuvres sur leur site Internet ou alors directement au sein de leur bâtiment, plus rarement en tant qu’acquisition.
Le FRAC (Fonds Régional d’Art Contemporain) du Languedoc Roussillon a été le premier à acquérir une œuvre du Net Art en 1998 : « Je suis ton ami(e)… tu peux me dire tes secrets » de Nicolas Frespech. Cependant peu de temps après son acquisition, l’œuvre va être censurée pour la teneur choquante et obscène de son contenu : elle recèle les secrets de plusieurs milliers d’internautes qui n’étaient pas surveillés.
Il existe des sites d’exposition qui regroupent des projets artistiques, il existe aussi le site Video Museum qui recense toutes les œuvres du Net Art que possèdent les FRACs, certains musées…
La conservation implique des pertes, et cela permet d’expérimenter de nouvelles formes de présentation et de préservation.
Il existe d’autres institutions moins conventionnelles qui vont conserver ces œuvres telles que « Rhizome » basée à New York et créée en 2003, et le projet de collection de Net Art initialisé par Doron Golan à New York nommé Computer Fine Art
La première est une organisation à but non lucratif mais il s’agit aussi d’une plate-forme dédiée aux Arts électroniques. Les artistes soumettent leur œuvres à l’organisation et c’est elle qui choisit de les inclure ou non. Les artistes peuvent soit les » lier » et ainsi l’organisation met à jour l’œuvre en même temps que l’original, soit les » cloner « , ce clone ne sera pas mis à jour il s’agit juste d’une version figée de l’œuvre à un moment donné. Cependant il n’y a aucune garantie sur la conservation de l’œuvre : l’organisation peut très bien perdre son serveur et la gérance de celui-ci, ce qui entraînerait une perte des données hébergées sur le serveur.
Pour ce qui est de Computer Fine Art, Doron Golan commande et achète des œuvres afin de les collectionner sur son site, il fonctionne essentiellement aux dons. Aujourd’hui sa collection est hébergée par la bibliothèque universitaire de Cornel (état de New York)
L’archivage :
L’archive est basée sur la documentation et non pas seulement la collection. Il existe deux types d’archives. La première est basée sur la collecte des documents, il s’agit surtout d’archiver les œuvres de manière qualitative et non quantitative avec des critères précis. Cette méthode demande beaucoup de temps et de personnel. L’autre type d’archives est basé sur les moteurs de recherche qui archivent la totalité des sites web au fur et à mesure des changements. Cependant il ne permet pas de rassembler la quasi totalité des œuvres car le net dispose de sites » cachés » ou » profonds » pour lesquels il faut des mots de passe et les robots n’y accèdent pas.
Parmi ces deux types il y a deux solutions possibles d’archivage : soit archiver la totalité des pages composant le site web, soit photographier le site à un moment précis avec une périodicité
Contrairement aux autres organisations le projet V2_ veut créer une sorte d’archivage des données du Net Art. Il s’agit à l’origine d’un centre consacré aux expositions, colloques mais aussi sur le développement de projets de recherche et de publications centrés sur les médias instables. Il est basé à Rotterdam. Le projet d’archivage a pour but principal la documentation des œuvres qui ont été montrées et réalisées dans le centre du V2_ et non leur acquisition. Dans le Net Art la documentation et l’œuvre sont très proches, ce qui ne pose aucun problème.
Il s’agit d’un des premiers centres à mettre en place une liste de termes afin de décrire les différents modes d’interactions. Il collabore avec d’autres centres dans le but d’agrandir l’archivage et qu’il soit accessible par tout un chacun.
Il promulgue les archives ayant des licences libres.
Sources
« Internet art : the online Clash of culture » Julian Stallabrass 2003
« Art et Internet » Fred Forest 2008
« Art et Internet » Jean-Paul Fourmentraux 2010
« le net art au musée » Anne Laforet 2011
Net Art les origines
Conservation du Net Art
Classement œuvre du Net Art
Pourquoi je suis devenue une historienne du Net Art
Wikipedia – Art en ligne