Wim Delvoye est un contemporain belge connu pour ses oeuvres humoristiques et provocantes. Il s’inscrit dans la lignée d’artistes tels que Marcel Duchamp et ses ready-made, Piero Manzoni et ses merdes d’artiste ou encore René Magritte et son oeuvre ceci n’est pas une pipe.

Wim Delvoye est né en 1965 à Wervik en Belgique. Il débute une formation à l’école des Beaux Arts de Gand mais est renvoyé lors de sa dernière année, après s’être battu avec l’un de ses camarades. Cette réputation de trublion le poursuivra tout au long de sa carrière puisque sa pratique du détournement lui donnera le surnom d' »enfant terrible» de l’art contemporain.

Les fameuses machines Cloaca de Win Delvoye

C’est tout d’abord avec ses Cloaca (2000) que l’artiste se fait connaître. Ces machines à produire des excréments le propulsent sur le devant de la scène artistique et révèlent non seulement l’humour du créateur mais également son talent. Les machines Cloaca ont été au fil des années perfectionnées et rendue plus compactes (les première machine mesurant environ 10 mètres de long).

Cette machine est la Cloaca New and Improved de 2001 elle est l’une des premières iterations de la Cloaca.

Wim Delvoye fait parfois intervenir de grands chefs étoilés qui préparent des plats pour les donner aux machines Cloaca. Cette blague montre encore une fois l’humour de Delvoye mais aussi son caractère provocateur.

Cloaca Turbo (n°4)

La Cloaca Turbo est la quatrième machine Cloaca produite par Wim Delvoye. Elle fait son apparition en 2003.
Elle permet une digestion plus rapide que ses grandes soeurs grace aux machines à laver qui viennent accélérer le processus de digestion.

La Cloaca n°5

La Cloaca n°5 est une version assez compacte de la machine, mais Wim Delvoye est ensuite allé encore plus loin dans la miniaturisation en particulier avec sa Cloaca Travel Kit de 2009.

Les machines Cloaca sont bien sur des oeuvres qui prêtent à sourire. Elles interrogent néanmoins sur des questions telles que la surconsommation, le gaspillage alimentaire, la frontière entre humanité et machine, l’utilisation de la technique à des fins absurdes etc.

« Un artiste entrepreneur »

L’œuvre de Win Delvoye est une véritable entreprise, il se surnomme d’ailleurs « artiste-entrepreneur ». De nombreux assistants, avocats et conseillers financiers l’épaulent dans ses projets.

C’est dans une ancienne école primaire de la ville de Gand que tous s’attèlent à la réalisation des projets fous de l’artiste. L’ancienne cours de recréation est devenue le lieu d’embarquement et de débarquement des œuvres, les salles de classes ont elles été transformées en bureaux. Delvoye veille comme un maitre d’école.

C’est d’ailleurs souvent seul qu’il préfère se retrouver dans son atelier, ou se mêlent romans de Stendhal, Madonne de Guido Reni et les fameuses bonbonnes gandagas.

Gandagas, Wim Delvoye, 1988, peinture émaillée sur bouteille de gaz, 60 x 30 x 30 cm

Oeuvres

Wim Delvoye est connu pour son sens de l’humour et sa maîtrise des techniques artistiques : photographies, sculptures, vitraux, tatouages… L’artiste se révèle être non seulement brillant mais également polyvalent. En effet, l’œuvre de l’artiste est difficilement saisissable et toujours surprenante.

Les premières œuvres qu’il présente se trouvent être des détournements d’objets :
Les Gandagas (1988) sont des bonbonnes de gaz peintes grecs soit un symbole de la culture grecque classique apposé sur un objet contemporain du quotidien. L’année suivante, il présente Shovels, des pelles, lame de scie, et planches à repasser peintes aux armoiries de princes.

En 1990, il présente ses  »Mosaïques », des carreaux de céramiques illustrés de ses propres excréments. La même année, dans un autre registre cette fois ci, il démontre sa maitrise en reproduisant à échelle réduite des bétonneuses, taillées dans du bois, de style Louis XV.

Eddy et Christophe etc.

Puis il s’attelle à une œuvre qui fera polémique,  »Eddy et Christophe etc. », qui consiste à tatouer des cochons vivants mais anesthésiés. Sauvés de l’industrie agro-alimentaire, ces derniers seront exportés en chine, dans la  »Art Farm » (une ferme achetée en Chine pour l’occasion, ornée d’un immense portail fabriqué par Delvoye) de l’artiste. Cette œuvre soulèvera de nombreuses questions notamment sur l’industrie agro-alimentaire mais également sur l’humanisation de l’animal. Mais la plus grande question réside dans l’œuvre elle même : est ce la vie de l’animal entière qui fait œuvre, ou simplement sa peau, vendue après sa mort ?

Suivront ensuite toutes sortes de travaux : sa fameuse machine à excrément ( »Cloaca »).

Il conçoit une chapelle tout en métal ornée de vitraux représentant des baisers, intestins humains, squelettes.
Toujours dans le domaine de la sexualité, il réalisera des « anal kisses », des séries de nichoirs pour oiseaux décorés d’accessoires sado-maso.

Wim Delvoye ne se référe pas seulement à la sexualité ou à l’organisme d’être vivant mais aussi sur la religion (dont la chapelle). Une grande parti du travail de l’artiste a été inspiré de la culture catholique. Il dénonce les tabous, les interdits religieux afin qu’on saisisse les contradictions de notre société. Il fait passer ce message grâce à des structures; des engins structurés de métal style gotique.

Mais récemment, il est arrivé à l’apogée de son art, avec l’œuvre Tim Steiner, l’homme tatoué (2008). Ce ne sont plus des cochons qu’il tatoue cette fois-ci mais bien un homme. Ce dernier fut vendu pour la somme de 150 000$ en septembre 2008 et l’acheteur a acquis le droit d’exposer l’œuvre 3 à 4 semaines par an et de récupérer le tatouage à la mort de Tim.

Citations

« Je suis né à Wervik, petite commune située à la frontière linguistique. D’un côté du pont, c’était la Flandre. De l’autre, la Wallonie. Cela me tracassait. Je ne comprenais pas cet arbitraire imposé par le monde politique au mépris des gens. De même, je voyais des maisons dont toutes les fenêtres, sauf une seule au rez-de chaussée, avaient été murées à la suite d’une imposition calculée depuis le code Napoléon… en fonction de leur nombre. Comment le pouvoir de quelques-uns pouvait-il s’arroger le droit de limiter ainsi l’accès à la lumière ? »

« Je ne fais pas confiance à l’Etat, je fais confiance aux gens. »

« Oui, je m’attache de plus en plus aux choses anciennes… peut-être que je deviens un vieux con. »

« [Je me sens] très proche de grands créateurs d’images comme Walt Disney, Andy Warhol et Joseph Beuys »

« Personne ne veut admettre que la force qui est derrière l’art, c’est qu’on peut le posséder. Je paye des tatoueurs pour tatouer des petites peintures sur les cochons. C’est très spécial de tatouer, c’est vraiment anticlasse, sauf chez les crapuleux. Et je montre au monde des œuvres qui sont tellement vivantes qu’elles doivent être vaccinées… Ça vit, ça bouge, ça va mourir. Tout est réel. L’art vivant, c’est plus intéressant que l’art empaillé. »

« J’ai d’abord eu l’idée de faire une machine nulle, seule, avant de concevoir une machine à faire du caca. J’ai pensé aux Temps Modernes, à Chaplin, à sa machine à manger, à cette fascination du début du XXe siècle pour la machine. »

« J’adore ce genre de seuils : par exemple, tu manges dans un beau et bon restaurant, et ce qui se passe à deux centimètres derrière tes dents est horrible ! »

« Je pourrais d’abord définir le décoratif de façon péjorative comme quelque chose de superflu et d’inutile. Le décoratif, c’est ce qu’on ajoute à l’œuvre et qui occulte sa logique. Mais, en ce sens, mon art n’est pas décoratif. D’autre part, je considère l’ornement comme un art de l’effet, c’est ce qui est immédiatement lisible et qui plaît aux gens. Ce que je fais est donc décoratif, mais pas comme une mascarade bourgeoise. Plutôt comme une écriture visuelle primitive, un art primitif. La beauté de base. Le décoratif est un langage de masse. »

Expositions

  1. Présentation de « the origin of species » à la Biennale de Lyon 2005
  2. Du 03 mars 2007 au 12 mai 2007 :Galerie Emmanuel Perrotin ? Paris
  3. Du 30/09/2007 au 06/01/2008 : Casino Luxembourg
  4. Du 13 décembre 2008 au 31 janvier 2009 : Galerie Rodolphe Janssen, Brussels
  5. Du 16 janvier 2009 au 14 février 2009 : Galerie de l’UQAM, Montréal
  6. Du 03 juin 2009 au 22 novembre 2009 : Peggy Guggenheim Collection, Venice
  7. Du 13 février au 23 mai 2010 : MAMAC Nice
  8. Du 16 avril au 22 aout 2010 : musée Rodin
  9. Jusqu’au 23 Janvier 2011 : BOZAR de Bruxelles

Sources

  1. Site internet de Wim Delvoye.
  2. Interview de Wim Delvoye dans le journal « Le Monde ».
  3.  »Le dessin hors papier » sous la direction de Richard Conte
  4.  »L’art contemporain mode d’emploi » de Élisabeth Couturier
  5. Article de Revuecapture sur les différentes versions de la Cloaca.