Rudolf Laban est un artiste Hongrois : danseur, chorégraphe, pédagogue et théoricien de la danse. Il est notamment à l’origine de nouvelles conceptions du mouvement et de la notation chorégraphique : la labanotation. Il pratique la danse traditionnelle hongroise appelé csárdás, puis étudie l’art à l’École des beaux-arts de Paris à partir de 1907.
C’est un artiste qui s’intéresse au rapport du mouvement humain à l’espace qui l’entoure. Il se concentre sur l’art du mouvement : Bewegungskunst et la danse expressive : Ausdruckstanz.
Rudolf Laban a fondé une école à Munich en 1910, dont l’artiste Mary Wigman sera élève, une autre sur le Monte Verità en Suisse, une école, que rejoignent bientôt de nombreux partisans de la danse moderne et y dispense des cours d’été (1913-1919). En 1923, il fonde à Hambourg son propre théâtre, consacré à la danse et en 1927, l’Institut chorégraphique de Berlin.
Il organise aussi un grand congrès pacifiste et végétarien en 1914 qui célèbre le coucher et le lever du soleil : Sang an die Sonne.
LA NOTATION LABAN
Son impulsion de départ est exprimée dès sa toute première publication, Die Welt des Tänzers. Fünf Gedankenreigen (Le monde du danseur. Cinq rondes d’idées), où il remarque, en 1920, que :
Personne n’a jamais observé le mouvement en tant que tel, on a presque entièrement ignoré l’élément générateur, telle une danse au sein de l’énergie mouvante, et on est passé à côté de l’indice essentiel sur la nature même du jeu énergétique. On a considéré la forme comme un facteur esthétique ou mathématique, et on n’a pas pris en compte la substance de son jeu, de sa danse avec les pouvoirs générateurs de formes et ses tensions spatio-rythmiques. Outre le mouvement des corps dans l’espace, il existe le mouvement de l’espace dans les corps…
En 1928, il publie alors Kinetographie Laban qui propose un système de notation pour les mouvements dansés primaires appelé par suite labanotation. Cette étude est aujourd’hui utilisée dans d’autres domaines que la chorégraphie, par exemple, dans les études culturelles, la communication non verbale… Il propose également des mouvements de danse pour les masses, soit un art du « ch’ur en mouvement ».
Rudolf Laban a construit son système autour des quatre éléments essentiels constitutifs d’un mouvement : l’espace, le temps, le poids et la force.
Les signes d’écriture sont placés le long d’une portée verticale qui se lit de bas en haut. La ligne verticale centrale définit l’appui au sol. Ainsi, la plupart du temps, les appuis des pieds sont placés à gauche et à droite de la ligne centrale, déterminant le pied en mouvement.
Un même signe peut indiquer :
-la direction du mouvement : en fonction de sa forme, comme indiqué sur la figure ci-contre (avant – arrière – gauche – droite – diagonales – sur place) ;
-sa hauteur : en fonction de son remplissage, noir pour bas, blanc pour intermédiaire et hachuré pour haut (exemple pour les appuis : haut = sur pointe ; bas = plié ; intermédiaire = « normal »)
-sa durée : en fonction de la longueur du signe ;
-la partie du corps concernée par le mouvement : selon le symbole de la partie du corps qui est juxtaposé au signe.
-Le placement des signes sur la portée donne la simultanéité des mouvements (lecture horizontale) et leur succession (lecture verticale).
Les distances, les relations avec des partenaires ou avec des objets, le centre de gravité, la dynamique, les tours, sauts, trajets et déplacements au sol sont indiqués par des signes spécifiques.
En Allemagne, le système a été développé par Albrecht Knust, au Royaume-Uni et aux États-Unis par Ann Hutchinson Guest et en France par Jacqueline Challet-Haas.
Ci-dessous le diagramme de l’«effort», qui permet d’observer et d’expérimenter les mouvements du corps selon 4 facteurs : poids, temps, espace et flux, eux-mêmes polarisés (poids «fort» et poids «léger», temps «soudain» et temps «soutenu», espace «direct» et espace «indirect» (ou «flexible»), flux «contenu» et flux «libre» :
L’ETUDE DU MOUVEMENT
Laban définit différents plans du mouvement : le plan de la table (horizontal), de la porte (vertical), de la roue (sagittal). Il construit un icosaèdre avec différents points et angles de l’espace et entre dans cette structure qui précise les directions du corps. Cette sphère du mouvement, la kinésphère, se déplace avec le danseur qui en est le centre.
On distingue aujourd’hui six catégories distinctes du mouvement dans les études de Laban, qui répondent à différentes questions :
Le Corps
Qu’est-ce qui bouge et comment ? Quel est le mouvement produit ?
L’étude de mouvements effectués par différentes parties de notre corps prises une à une et les articulations qui se mettent en place pour donner la fluidité et la direction supposent que l’on connaisse la structure du corps humain et son organisation. Il nous faut comprendre d’où part le mouvement, quelle partie du corps l’a initié et quels sont les faits, actions qui en résultent.
L’Espace
Où va le mouvement ? Dans quel espace s’inscrit-il ?
L’Homme doit vivre en harmonie avec son environnement, apprendre à y évoluer sans peine. Pour cela il le structure en lui donnant la forme d’un icosaèdre au milieu duquel il se trouve (la kinésphère). Cette forme harmonieuse lui permet d’apprendre à utiliser l’espace et à le visualiser en trois dimensions pour donner toute sa mesure au mouvement. La notion d’espace est liée chez Laban à celles d’énergie et de forme.
L’Effort
Comment le mouvement est-il exécuté ? Avec quelles qualités d’énergie ?
Laban parvint à analyser le terme de dynamique du mouvement, qu’il préféra nommer énergie, grâce à d’autres notions simples. La singularité d’un mouvement résulte de la diversité des combinaisons corporelles possibles et de son exécution, relativement aux facteurs suivants : le poids, le temps, l’espace et le flux. Cette analyse de l’énergie a permis de définir la qualité de l’expression non verbale, qui diffère selon le vécu des individus et le contexte de réalisation. Le diagramme de l’Effort, présenté plus haut, permet de visualiser cette théorisation.
La Forme
Quels sont les différents chemins empruntés par le mouvement ?
La forme plastique du corps humain et sa relation à son environnement change à chaque mouvement.On observe son aspect, c’est-à-dire le processus d’exécution et ce que cela change dans le corps. Ceci est directement lié à la respiration, notion fondamentale en danse contemporaine, car c’est par celle-ci que le mouvement existe. La forme est très importante car c’est ce qui est perçu par les autres, c’est un réel moyen de communication signifiant.
Le Phrasé ou le Rythme
Dans quel laps de temps et suivant quel rythme s’effectue le mouvement ?
La notion de phrasé est propre à chaque individu. C’est ce qui le défini (par exemple d’un point de vue chorégraphique), il est caractéristique de sa propre façon d’user de son corps dans le temps, l’espace et avec quelle énergie. Grâce à cette catégorie, on peut apprendre beaucoup d’une personne, sur son comportement: elle traduit en effet une part d’inconscient donc dépasse le stade purement physique pour s’inscrire en partie dans sa psychologie. Après observation, le phrasé de chaque individu devient reconnaissable.
L’Interrelation
Comment l’individu en mouvement est-il en relation avec son entourage ?
Dans cette catégorie, Laban traite de la relation entre la personne en mouvement et une autre personne ou un objet du monde. Ce degré de relation diffère selon la manière dont le corps qui bouge aborde l’autre, s’en approche, le touche ou bien s’y appuie.On entre alors soit dans une relation d’égalité ou bien dans un rapport de forces (entre un actif et l’autre passif).
Grâce à ces six catégories, il est possible de définir précisément le mouvement. Le but de ces études étaient pour Laban d’éprouver, observer, comprendre et présenter les différents aspects du mouvement.