Hundertwasser est un architecte pionnier qui a su conjuguer art, écologie, reflexion sociale et architecture. Peintre, penseur, architecte, humaniste et écologiste, il dénonce la rigidité de l’architecture classique et prône le refus de la ligne droite. Il a pour principe la dominance de la nature, l’importance de la couleur, le refus de la conformité et de l’uniformité.
Il a été l’un des pionniers de l’architecture écologique. Portrait de l’artiste autrichien Hundertwasser, disparu en 2000 et source d’inspiration pour des générations de bâtisseurs verts.
Dans son manifeste de 1990, il se définissait comme « un médecin de l’architecture ». De ce serment d’Hippocrate, Friedensreich Hundertwasser (1928-2000) aura fait sa ligne de conduite et son exigence artistique. Il aura été l’un des premiers à diagnostiquer la fracture entre l’homme et la nature au sein du corps de la ville. L’un des premiers à soigner l’architecture de son classicisme moribond, pour mieux lui faire porter une mission réconciliatrice, humaniste et créatrice de possibles.
« La ligne droite est un danger créé par l’homme car elle est étrangère à la nature de l’homme, de la vie, de toute création ? »
Hundertwasser
Cette conviction, Hundertwasser n’aura de cesse de la mettre à l’épreuve tout au long de sa vie. Façades multicolores aux teintes saturées, ouvertures asymétriques, formes audacieuses? L’artiste jette les bases d’une architecture nouvelle. A Vienne, sa ville de naissance, mais aussi ailleurs en Autriche, tout comme en Allemagne, en Suisse, au Japon, et jusqu’en Nouvelle-Zélande, il va mettre l’architecture au service de l’humanisme et de l’écologie.
Maisons, HLM, églises, hôpitaux, halte garderies, usines, et même, aires d’autoroute et toilettes publiques? Il redessine les villes en profondeur. Fervent défenseur de l’environnement, précurseur de l’écologie, Hundertwasser crée des immeubles avec des arbres aux fenêtres (l’arbre-locataire), conçoit et réalise en ville et à la campagne des maisons dont les toits sont recouverts de verdure et de végétaux, des sols à niveau inégal et encourage les propriétaires et les ouvriers à être créatifs et à apporter une touche personnelle à leur travail.
Ses manifestes portent la marque de cette volonté émancipatrice. Ainsi dans Ton droit à la fenêtre, il affirme que dans un habitat collectif, l’habitant est maître de tout ce qu’il peut atteindre de sa fenêtre autrement dit, le concepteur doit tenir compte des désirs de l’utilisateur. Il est également l’un des premiers à prendre en compte « l’empreinte écologique » du citoyen et du citadin moderne. Ce dont témoigne ses ouvrages Pour une société sans déchet, La folie du nettoyage, La toilette-humus. A sa suite, des générations d’architectes, mais aussi d’urbanistes et d’artistes, lui emboîteront le pas. Le « médecin de l’architecture » aura finalement réussi son pari : faire accoucher d’une autre façon de penser la vie en collectivité, la nature, et la ville. Et si, en la matière, beaucoup de chemin reste encore à parcourir, l’artiste aura ouvert la voie, preuve que comme il l’écrivait, « si quelqu’un rêve seul, ce n’est qu’un rêve. Si plusieurs personnes rêvent ensemble, c’est le début d’une réalité ».
Les idées novatrices d’Hundertwasser
- Le droit à la fenêtre : pour Hundertwassser, la fenêtre est un pont entre l’intérieur et l’extérieur, chaque locataire doit pouvoir se l’approprier et la décorer selon son envie avec de la mosaïque, des vitraux? Elle représente aussi nos yeux sur l’extérieur.
- La ligne droite est impie : la ligne droite n’existe pas dans la nature donc l’utilisation de la règle et de l’équerre en architecture représente pour lui une forme de déclin. Il pense que nous vivons dans une prison de lignes droites et il ne comprend pas pourquoi personne ne révolte.
- Une société sans déchets : Hundertwassser est pour le recyclage et pour une société qui vit en harmonie avec la nature donc sans la polluer et en la respectant.
- Toilette-Humus : pour Hundertwasser, l’homme qui utilise ces toilettes, n’a pas peur de la mort. Car ses excréments sont préparés à une vie future. Il considère l’humus comme le véritable or noir.
- L’arbre locataire : au lieu de planter des arbres sur les toits il propose d’installer des arbres dans les logements, devant la fenêtre. 1m² doit leur être réservé ainsi l’arbre se développe est pousse vers l’extérieur en créant des irrégularités sur la façade.
- Les toits verts : en accord avec notre traité de paix avec la nature, nous devons rendre à la nature les surfaces que nous lui avons prise pour la construction en réinstallant cette nature sur le toit.
- La troisième peau : l’homme est entouré de 3 couches, sa peau, ses vêtements et les murs des bâtiments qui l’entourent. Cette troisième doit être appropriable et personnalisable par le locataire.
- Il est contre l’énergie nucléaire : pour lui l’Homme doit se soumettre aux limites écologiques de la Terre pour que celle-ci puisse se régénérer. L’énergie nucléaire se résume pour Hundertwasser à un désastre économique et une catastrophe écologique.
Hundertwasser et l’architecture
1975 : Projet de maisons aux prairies hautes
C’est projet dans lequel on retrouve l’essence même de son message écologiste ainsi que son rapport à la nature. Hundertwasser a planté plus de 100 000 arbres dans sa vie. Il a dessiné de nombreux projets comme celui-ci qui n’ont jamais été réalisé surement à cause la constructibilité d’une telle maison. La quantité de terre nécessaire pour faire pousser de grands arbres et considérable donc la structure de la maison, pour celle-ci en spirale, doit être conçue en fonction.
1983-85 : Hundertwasserhaus
La Hundertwasserhaus est un projet de logements collectifs à Vienne qui est très coloré et réalisé avec de nombreux matériaux. Ce projet se veut convivial et compte plus de 250 arbres et arbustes sur le toit ou les balcons. A l’intérieur du projet se trouve un patio avec une fontaine qui coule à l’envers.
C’est des bâtiments les plus visités de Vienne.
1998-2000: Darmstadt Spirale
Il s’agit d’un projet de 150 logements à Darmstadt. Cette spirale est une allégorie de la terre, elle représente les différentes strates de la terre et les sédiments déposés avec le temps. La dernière strate est le toit vert recouvert d’arbres et de végétation spontanée.
1988-95: Halte-garderie Heddernheim
Conçue pour 100 enfants et dans le cadre du développement du quartier nord de Francfort, cette garderie avait pour but d’embellir le quartier et de créer un contraste avec les bâtiments existants.
Elle est formée de 2 buttes de terre qui émergent du sol et replongent, cela crée donc des toitures inclinées qui sont végétalisées et accessibles pour les enfants.
L’atmosphère créée est donc très poétique et onirique, très intéressante pour des enfants.
2004-2005: Ronald McDonaldhaus
Ce projet est une des 14 maisons destinées aux parents d’enfants hospitalisés. Hundertwasser a dessiné le projet en 1999, et a choisi l’emplacement du bâtiment, à Essen en Allemagne, en pleine nature au milieu d’un parc. Il souhaitait un environnement sain et reposant pour les familles et les enfants.
Précurseur de l’écologie
Reboisement de la ville
Dans la partie Art & Ecologie, je vais vous parler de son premier texte sur l’écologie. Un écrit intitulé « Reboisement de la ville », écrit en 1971, qui se veut dénonciateur sur le comportement des Hommes vis à vis de la Terre. Hundertwasser met en cause la multiplication et la surexploitation de la Terre par les Hommes, qui ont ramené le gaz et le limon sur Terre, alors que cette dernière avait mis plusieurs millions d’années à les enfouir sur Terre pour que nous, les humains puissent y vivre.
Par le biais, des toits et des routes qui doivent devenir des forêts vertes, nous devons relaisser la place à la végétation. Idée que le sol appartient à la nature, l’Homme doit construire sur la hauteur, actuellement il y a un déséquilibre dans l’occupation de l’espace par l’Homme, qui pour l’auteur nous place dans une situation d’urgence. L’Homme doit aussi s’occuper de récupérer ces déchets pour en faire du compost, engrais pour aider à la prolifération de la végétation sur les toits.
L’auteur insiste sur le fait que pour lui, chaque famille doit avoir à au moins 100 m3 de végétation et 100 m² de terrain pour ces déchets et excréments. La relation Homme-arbre doit aussi prendre une dimension religieuse en remplaçant notre adoration au Christ ou Dieu pour celle envers la végétation.
C’est le premier texte qui va vraisemblablement lancer sa lutte contre le comportement de l’Homme.
Son combat contre l’énergie nucléaire
Un de ces principaux combats a été la lutte contre l’utilisation, la production d’énergie nucléaire. Lutte visible à travers ce texte « L’énergie nucléaire est un jouet dangereux. » Texte écrit lors de la présentation de l’affiche « Plantez des arbres » lors de la campagne écologique de Ralph Nader en 1980.
Energie nucléaire caractérisé de jouet car elle est utilisé à outrance et sans réel nécessité par l’Homme. Mais est comparé à la roulette russe, car pour Hundertwasser, en l’utilisant on face à des catastrophes qui peuvent intervenir à n’importe quel moment. C’était là aussi un précurseur car, il écrit ce texte en 1980 et en 1986 à lieu la première catastrophe nucléaire de grande ampleur, Tchernobyl.
Il met aussi en valeur le problème des déchets atomiques, il n’y a pas d’endroit sûre pour les « cacher » au reste du monde, leurs conteneurs sont d’ailleurs des bombes à retardement car sur Terre rien n’est statique à cause des bombes, guerres et séismes. Pour Hundertwasser, les premiers responsables sont les scientifiques car ils divulguent des mensonges criminels sur l’énergie nucléaire et son aveuglé que par l’idée de progrès. L’énergie nucléaire n’est qu’un désastre économique pour l’auteur car à court terme certes elle répond aux besoins mais à long terme elle entraîne des séries de catastrophes potentielles. L’utilisation de cette énergie est pour lui un chaos technocratique, un cancer qui ne peut se soigner que par la créativité écologique de chacun. Dans l’idée de Hundertwasser, si tout l’argent utilisé dans l’énergie nucléaire avait été mis à disposition du développement de l’énergie solaire, il n’y aurait plus aucun problème à l’heure actuelle.
Les propositions écologiquement viables
Hundertwasser, dans plusieurs de ces textes, explique pour lui il y a deux solutions primordiales. La première, la réalisation d’un traité avec la nature, écrit en 1983, un traité car la nature est pour Hundertwasser la seule puissance supérieure dont dépend l’Homme.
- L’Homme doit apprendre le langage de la nature pour communiquer avec elle.
- On doit rendre les territoires usurpés et dévastés à la nature.
- On doit accepter la végétation spontanée comme la mousse et les mauvaises herbes.
- L’Homme doit réunifier ces créations et celles de la nature, sinon la désunion peut provoquer des conséquences fatales pour les deux.
- Vivre en harmonie avec ce traité de la nature.
- L’Homme ne doit pas oublier qu’il est l’hôte de la nature, il doit donc se comporter comme tel.
- Redevenir une société sans déchets, en respectant ses propres déchets via le recyclage.
La deuxième solution est l’installation d’arbres locataires. C’est le meilleur moyen pour reboiser la ville, en plantant ces arbres dans les appartements. Il n’y a rien de plus voyant pour Hundertwasser de voir du 4ème ou 10ème étage d’un immeuble, un arbre dépasser du bâtiment. Cela à un effet positif sur les habitants.
C’est un symbole car voir un arbre dépasser d’un immeuble touche plus les gens que de voir 100 arbres dans un parc. Dans cette idée de reboisement de la ville, ramener la nature dans la ville c’est le grand défi des architectes. Car ces arbres sont des obstacles à la beauté, des irrégularités non réglementées qui grâce à eux, l’Homme pourra gagner sa guerre contre la ligne droite et l’angle droit.
Conclusion
Hundertwasser est un grand pionnier de l’architecture humaniste et écologique, un amoureux de la nature qui tente de concilier créativité artistique et écologique.
« Personnalité dominante, entendons-nous bien : Hundertwasser aura dominé son époque en s’enracinant d’emblée dans son originalité marginale, une originalité fondée sur l’extrême précocité de sa vision existentielle »
Pierre Restany, 2003
Citations d’Hundertwasser
- « L’horizontal appartient à la nature, le vertical à l’homme. », 1971
- « On ne peut parler d’architecture que lorsque l’architecte, le maçon et l’occupant sont une unité, c’est-à-dire une seule et même personne », 1958
- « Chacun doit avoir la possibilité de construire. », 1966
- « Il est évident que les territoires, qu’on a pris illégalement à la nature, doivent lui être rendu, au cours d’un processus de paix. », 1986
- « La nature doit pousser librement partout où la neige tombe en hiver. », 1971
- « Ainsi la Terre ressemble à nouveau à un enfer, dans lequel l’Homme est en train de se suicider. », 1980
- « Il n’y a pas d’anomalies de la nature. Il y a seulement des anomalies de l’Homme. », 1990
- « Si vous et votre voisin êtes créatifs, pas besoin de voyager très loin car le paradis est tout près. », 1999